Que penses-tu du fait d’instaurer un quota de 30% d’élèves boursiers dans les grandes écoles ?

Le concept même de grande école repose sur la notion de sélection : sélection qui se fait suivant les critères académiques et largement objectifs qui sont de mise aux concours. Pour que 30% des élèves d’une promotion soient boursiers, il faut donc soit instaurer un concours bis pour chaque école ouvert à cette seule catégorie d’élèves, soit, après correction des copies, établir un double classement pour séparer les boursiers des non-boursiers. Dans le premier cas, un concours dévalorisé, réputé de moins bon niveau par définition, va venir casser le positionnement d’une école. Dans le second cas, le fait qu’un fils de prof qui a décroché un 15 en math soit recalé au profit d’un fils d’ouvrier  qui a eu 14, a de quoi choquer les conceptions de justice et d’égalité (et je comprendrais que le fils de prof en question, aigri et désabusé, vienne grossir le rang des délinquants juvéniles rejetant la société).

Je prendrais la question dans l’autre sens et j’en rajouterais plusieurs autres, puisque rien n’est simple en ce bas monde: comment intègre-t-on une grande école ? En passant un concours, synonyme de classement. Qu’est-ce qui prépare à ce concours ? Les classes prépas. Comment accède-t-on à une prépa ? En ayant un bon dossier scolaire en Première et en Terminale générales. Vous avez compris le principe, on peut remonter ainsi jusqu’à la maternelle : chaque année passée dans le système scolaire amène à une sélection. Il y a peut-être 30% de boursiers en maternelle, et quelque part dans le parcours qui mène à une grande école, une cassure se produit : il n’y aurait plus que 16% de boursiers dans les filières générales du 2nd cycle. C’est avant cela qu’il faut intervenir, donc bien en amont de la prépa, pour assurer que le fait d’être ou non boursier n’ait pas d’influence sur les différentes étapes de sa « réussite » scolaire. Et il faut reconnaître que cela n’est pas compatible avec des classes surchargées, des profs démotivés, des cours de langue inadaptés, un bac au rabais, voire la suppression des enseignements de culture générale comme l’histoire-géo dans certaines filières : autant de « désagréments » que les milieux favorisées peuvent compenser par des cours particuliers, des voyages culturels, une bibliothèque bien fournie.  

Encore une longue réponse sur mon sentiment concernant une mesure que je pourrais résumer en deux mots : démagogique et inefficace (comment ça, je me répète :-) ?).

Share
Ce contenu a été publié dans My life, avec comme mot(s)-clef(s) , . Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Facebook comments:

Une réponse à Que penses-tu du fait d’instaurer un quota de 30% d’élèves boursiers dans les grandes écoles ?

  1. Paul dit :

    Il y a 40% d'élèves boursiers en moyenne au niveau du baccalauréat (bac+1, toutes formations confondues).
    Si on vous suit, considérer qu'il ne peut pas y avoir la même proportion d'élèves boursiers dans la population générale que dans celle des grandes écoles => qu'un faible revenu des parents signifie que les élèves soient intrinsèquement inférieurs (pauvres = bêtes).
    Si pauvres = bêtes, alors effectivement la seule solution est d'instaurer un second concours.
    Mais on considère que toutes nos sociétés occidentales sont fondées sur le principe de l'égalité des individus sans distinction sociale.
    Donc, on ne peut admettre que les pauvres soient bêtes (pauvres != bêtes).
    Il faut donc supposer que si les boursiers réussissent moins bien que les autres aux concours des grandes écoles, ce n'est pas parce qu'ils sont bêtes, mais parce que des facteurs annexes viennent parasiter leur capacité à faire preuve de leur intelligence. Liste sommaire :
    - une moins grande propension à se présenter aux CPGE,
    - des dossiers moins prestigieux (lycée Montaigne de Paris 5e > lycée Jean Jaurès de Saint Denis) qui impliquent une prépa moins prestigieuse,
    - des conditions matérielles difficiles,
    - une moins grande confiance en soi,
    - une méconnaissance des codes (quand on est fils d'ouvrier, on ne sait pas ce que c'est qu'une bonne dissertation),
    - une autocensure,
    - un horizon plus court (on ne peut pas se permettre de cuber quand on a du mal à payer les derniers kebabs du mois),
    - etc.
    Appelons l'ensemble de ces facteurs, l'effet pur correspondant à tous ces facteurs réunis : K.
    Si on suppose que pauvres != bêtes, alors la sous-représentation des boursiers dans les GE s'expliquent exclusivement par K.
    Donc, en ciblant K on peut atteindre 30% (voire 40%) de boursiers en grandes écoles sans toucher au fait d'avoir de mêmes épreuves pour tous.

    Signé : un boursier devenu diplômé d'une grande école.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>