Ah, tiens, c’est vrai que je suis légitime pour répondre à la question vu que je publie essentiellement sur le Web, lieu de tous les crimes cybernétiques (à ne pas confondre avec cynégétique – un domaine pas exempt de crimes non plus mais c’est une autre histoire).
Principe fondamental : je suis contre le fait que l’on vienne brider une avancée technologique pour des considérations de droit d’auteur. A mon humble avis, c’est ce dernier qui devrait s’adapter à la technologie et non le contraire. Ca s’appelle aller dans le sens de l’histoire. Ceci étant dit, la problématique est sans doute différente pour la musique, les films et les livres. Un musicien peut faire des concerts. Un film peut être diffusé au cinéma. C’est cette valeur-là qui ne peut pas être reproduite par le téléchargement d’un mp3 ou d’un divx. C’est logiquement sur cette valeur-là que l’essentiel de la rémunération des artistes devrait être basée. Le reste, c’est du bonus. De l’amateurisme (et je n’ai rien contre l’amateurisme, je trouve que beaucoup d’amateurs font des choses remarquables). Alors oui, il faudra sûrement réduire le cachet de certaines stars et la participation versée aux majors. Et mettre en place cette fameuse licence globale – je vous fournis quand vous voulez les spécifications de la plate-forme universelle qui permettra de savoir combien de hits décroche n’importe quel film, n’importe quel morceau téléchargé. Bien sûr que tout le monde l’utilisera puisqu’elle sera gratuite et qu’elle référencera tous les contenus dans le format optimum. Bien sûr qu’elle sera mondiale, que c’est possible, Amazon et iTunes l’ont fait. Bien sûr qu’elle sera disponible dans toutes les langues. Bien sûr qu’elle permettra à un Esquimau du Groenland de découvrir le chant traditionnel zaïrois. Bien sûr qu’elle sera compatible avec l’iPod, Android et Silverlight. (Excusez-moi , déformation professionnelle).
Venons-en au livre. Il est plus facile de dématérialiser une musique ou un film qu’un livre. Ce dernier reste pour moi l’objet papier que l’on peut trimbaler dans le métro, à la plage, ranger dans une bibliothèque, laisser trainer sous le lit. Qu’on peut prêter, aussi. Ca changera peut-être avec l’avènement des livres numériques – auquel cas, ma plate-forme universelle saura aussi s’en occuper –. Mais en attendant, qu’on pirate un de mes pdf pour économiser 2€50, ça m’en touche une sans bouger l’autre (d’oreille).
Et puis un dernier mot sur un argument que j’ai souvent entendu et qui me fait beaucoup rire : la baisse de la rémunération des artistes risquerait de nuire à la création. Plus personne ne voudrait composer de la musique, faire des films, écrire des livres, si on n’autorisait pas le tracking de l’adresse IP et la coupure fissa de la connexion Internet aux méchants téléchargeurs. C’est ignorer ce qu’est la création. Un besoin qui vous saisit aux tripes. Qui vous empêche de trouver le sommeil. Qui vous apporte tout le bonheur du monde. On écrit (compose ? filme ?) parce qu’on ne peut pas faire autrement. Ce ne sont certainement pas tous les écrivains aujourd’hui adulés et qui ont en leur temps fini dans le ruisseau qui diront le contraire.