Qu’est-ce que ça fait de dire non à un éditeur ?

Ah, je vois d’ici votre regard écarquillé et vos sourcils en point d’interrogation. Ainsi que les doutes qui soudain vous assaillent sur l’état de ma santé mentale.

Comment, quoi, Albin et Michel sont venus frapper à sa porte et elle a dit non ? Flammarion lui a fait un pont en or et elle a dit non ? Grasset, Actes Sud, Gallimard se sont battus pour elle et elle a dit non ? La dilettante a passé la nuit sur son paillasson et elle a dit non ? Service Littéraire a eu une illumination et elle a dit non ?

Bon, c’est à peu près ça. Sauf que personne ne s’est battu avec personne, aucun campement sauvage ne s’est installé devant ma porte ou sur mon paillasson, il n’a jamais été question de pont, et je suis toujours sous le coup d’une interdiction d’approcher à moins de deux nœuds réseaux de Service Littéraire. Mais j’ai quand même refusé l’offre d’un éditeur qui, après avoir lu le tome I de la Tentation, m’a proposé de signer un contrat.

Ah, je vois d’ici le regard entendu des connaisseurs du milieu: elle a failli se faire avoir par un margoulin chantre du compte d’auteur, cette édition où le wannabe paye pour qu’on lui fasse croire qu’il a du talent, celle qui crie au génie dès qu’on lui envoie un manuscrit rempli de feuilles blanches, celle qui te dit où signer avant de t’avoir lu.

Que nenni.

Simplement, mon éditeur à moi est aussi un wannabe. Et oui, l’auteur n’a pas le monopole de ce statut, et à l’heure du tout numérique, ils sont de plus en plus nombreux à se lancer à l’assaut de la e-littérature. Moi, j’ai envie d’y croire, mais j’ai encore des doutes. Et des interrogations, sur ce qu’un nouvel éditeur exclusivement web pourrait faire pour la Tentation que je n’aie déjà tenté. Je lui en ai fait part, à mon Petit Editeur du Net, de toutes ces questions, pour justifier mon début de non. Et il s’est alors passé quelque chose d’assez extraordinaire : il m’a dit qu’il comprenait et qu’il ne renonçait pas. Qu’il ferait ses preuves et qu’il reviendrait. Concluant par un « à bientôt » qui a forcément éveillé en moi certains échos.

Ça fait bizarre d’être passée, même pour quelques instants, de l’autre côté.

Maintenant, Petit Editeur du Net, il ne me reste plus qu’à espérer, très sincèrement, que tu réussiras.

Sometimes, the yes needs the no to win against the no.

 

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